Leçon 15 – Écouter, réfléchir, écrire ou écrire, réfléchir, tourner : Surviving Progress

Je voulais ce blogue comme un exutoire. Comme la preuve de mes déboires littéraires. Il devient, progressivement, un divertissement, mon divertissement et le seul endroit où je ne parle plus d’écriture. Paradoxe.

Je parle de plein d’autres choses : de livres, bien sûr, de films, d’événements (toujours un pas en arrière de l’actualité), mais d’écriture? De mon écriture? De mon roman en devenir? De mes problèmes d’écrivaine? Si peu.

Je n’ai certainement pas épuisé le sujet. Je n’ai surtout pas fait le tour de la question. Sûrement n’écris-je pas assez pour pouvoir y réfléchir suffisamment et être spirituelle, drôle et décalée dans ce blogue. Ou peut-être pas. À défaut de parler de moi, je parlerai de ce que j’ai vu. Pour l’instant du moins.

Je vais donc prendre quelques lignes pour réfléchir à propos de Surviving Progress que j’ai vu dimanche soir dans le cadre des Rendez-vous du cinéma québécois; occasion s’il en est une de revoir (surtout voir) les productions québécoises – courts, longs, documentaires, etc. – dont le temps et le stress de la vie en général ne nous a pas permis de profiter au moment de leur sortie en salle.

Donc, Surviving Progress. D’abord, « survivre » et ensuite, « progrès ». Le « documentaire cinématographique » de Mathieu Roy et Harold Crooks s’amorce sur la définition de la notion de progrès. Et là, et bien, silence ou élucubrations, regard flou et mains qui cherchent. Qu’est-ce que le progrès et comment pouvons-nous lui survivre? Sans être alarmistes, les réalisateurs nous rappellent que le progrès risque de nous anéantir un jour ou l’autre.

Puisque les livres ne sont jamais loin, le film est inspiré de l’ouvrage A Short History of Progress de Ronald Wright (paru en 2011 sous le titre Brève histoire du progrès, chez Bibliothèque québécoise), lui-même intervenant, aux côtés d’une vingtaine d’autres, connus et inconnus, dont Margaret Atwood, Jane Goodall, David Suzuki et Stephen Hawking.

Ce documentaire est un réel outil de compréhension et d’analyse du progrès, de ses pièges et résultats souvent désastreux, mais il n’est jamais doctrinaire. Mathieu Roy a d’ailleurs soutenu que Surviving Progress se veut comme un documentaire interactif et que tout un chacun est invité à se faire sa propre opinion. Avec un sujet aussi sensible, est-il possible de se construire une réelle opinion, sans jamais se laisser influencer par quelque propos que ce soit? Peu importe, le progrès continue sa marche.

Et comme la sortie en DVD n’a pas été encore annoncée, réfléchissez, vous aussi au progrès.

Site officiel de Surviving Progress

Leçon 12 – Être député, mais surtout poète. L’écriture au service des citoyens (mais aussi du réflexe politique)?

La voix est claire et me fait l’effet d’un coup de poing bien placé :

de tous ces trous-de-cul
on a notre maudit tabarnaque
de cinciboires de cincrèmes
de jériboires d’hosties toastées
de sacraments d’étoles
de crucifix de calvaires
de couleuré d’ardent voyage

Ces mots sont ceux de Gérald Godin, et l’extrait est tiré de la Nuit de la poésie du 27 mars 1970. Cette lecture par le poète ouvre le documentaire de Simon Beaulieu, Godin que j’ai regardé cette fin de semaine et qui est sorti en 2011. Je n’ai pas pu me retenir de l’évoquer ici.

Cette lecture de Godin ponctue aussi la qu’il faut absolument regarder :

Sur la pochette du DVD, on peut lire sous GODIN : « Documentaire sur le député-poète ». Juste ça, c’est intrigant, c’est beau, même. Dans cette expression-là, est-ce que c’est député ou poète qui le plus important?

J’ai appris beaucoup de choses sur Gérald Godin – en fait je ne le connaissais pas du tout! – et l’histoire du Québec dans ce documentaire, plus démonstratif que partipriste (Godin a déjà dirigé les Éditions Parti Pris), même si je ne peux pas m’empêcher chaque fois que je vois des gens aussi dévoués que Godin pour le Québec et la LIBERTÉ, de ne pas me sentir tout croche de ne rien faire pour ma province, mais bon ça c’est un autre problème. Godin, c’est tellement un grand, que tous les films de la terre ne pourront pas lui rendre hommage justement, sauf que Simon Beaulieu fait un excellent travail.

Constitué d’images d’archive (Godin est décédé en 1994), de témoignages de proches, dont Pauline Julien sa compagne de toujours, et de collègues journalistes et politiciens, dont Denys Arcand, Jacques Parizeau et Jacques Godbout, le portrait dressé par le documentaire est celui d’un grand homme, d’un grand poète, d’un grand politicien, d’un grand tout court. Et en plus, il y a pleins de belles chansons, comme Mommy interprétée par Pauline Julien et que je fredonne sur tous les tons depuis.

Pour le poète engagé qu’était Godin, je vous laisse sur ces mots du grand homme :

« Vu l’urgence que le Québec traverse actuellement, il est essentiel que l’écrivain ne se limite pas à gratter ses plaies, à raconter ses problèmes personnels, à évoquer ses nuits d’amour, à en souhaiter s’il n’en a pas, ou à chanter les charmes de sa noix, comme on dit, mais que son œuvre soit une contribution à ce qu’on appelle communément la lutte pour la libération nationale ».